Soutenance de thèse
Valor et Fortuna : Autorités guerrières, Révolutions et Indépendances en Nouvelle-Grenade et au Venezuela (1770-1831)
De Frédéric Spillemaeker - Mondes Américains
Résumé
L’ère des révolutions et des Indépendances en Nouvelle-Grenade et au Venezuela (1770-1831), est une époque de nouvelles politisations et de nouvelles formes d’autorités. L’historiographie a habituellement opposé les chefs indépendantistes institutionnels d’une part, aux caudillos irréguliers d’autre part. Pourtant cette opposition mérite d’être discutée. Pendant les Indépendances, des hommes nouveaux accédèrent à des fonctions de commandement militaire et parfois au pouvoir politique. Ces ascensions furent rendues possibles par une transformation des sociétés par la guerre, qui ébranlait le pouvoir des élites. Ces dernières avaient pourtant activement participé au mouvement des juntes en 1808-1810. Ces assemblées s’étaient réunies dans les cités, au nom du roi Ferdinand VII, déposé par Napoléon Bonaparte. Puis elles se divisèrent entre loyalistes et indépendantistes. La guerre civile commença, mais rapidement les villes et les élites n’y jouèrent plus les premiers rôles. De nouvelles autorités guerrières autonomes surgirent dans les campagnes et acquirent une puissance militaire inattendue. Les révoltes de l’époque coloniale avaient déjà montré la capacité des subalternes à contester les pouvoirs en place, mais ce phénomène prit une nouvelle ampleur dans les guerres d’Indépendance. Des hommes nouveaux apparurent, comme José Tomás Boves dans les grandes plaines (les Llanos) du Venezuela qui rassembla des milliers d’hommes sous son commandement. Ce phénomène n’était pas propre à un camp politique. Certains étaient royalistes : à l’instar de Boves ou d’Agualongo dans le sud de la Colombie. D’autres étaient patriotes, comme José Antonio Páez, autre homme des Llanos, ou Manuel Piar dans la province de Guayana. Leur autorité guerrière ne procédait pas d’une domination charismatique irrationnelle, mais d’un profond travail d’organisation logistique, stratégique et politique. Mis en lumière, ce travail d’organisation invite à nuancer l’opposition entre chefs institutionnels et guérilleros, car ils avaient des pratiques en partage. La tendance à l’autonomisation du commandement militaire se cristallisait dans des juntes de guerre qui montraient le pouvoir des officiers. De plus, l’étude des conceptions de l’honneur et des rapports de genre permettent de comprendre les masculinités combattantes. Des femmes eurent un rôle fondamental dans certains domaines comme la logistique et le renseignement. Hors des champs de bataille, la guerre se livrait aussi dans les pamphlets et les périodiques : tantôt machines de gloire au service de certains chefs, tantôt redoutables instruments de délégitimation ou de stigmatisation. À la fin de la guerre, le césarisme s’imposa comme l’organisation politique capable de réunir la culture guerrière, la culture constitutionnelle, et la volonté des élites d’établir un nouvel ordre social.
Jury
- M. Clément Thibaud (Directeur de thèse), EHESS
- M. Eric Schnakenbourg (Co-directeur), Université de Nantes
- M. Walter Bruyère-Ostells, IEP Aix-en-Provence
- Mme Masha Cerovic, EHESS
- Mme Véronique Hébrard, Université de Lille
- Mme Carole Leal Curiel, Universidad Simon Bolivar (Venezuela)
Informations pratiques
- Samedi 14 novembre 2020 - 09:00
- Visioconférence Afin d'affecter le moins possible la qualité de la visioconférence nous sommes contraints de limiter l'accès au public. Les personnes souhaitant assister à la soutenance devront se rapprocher du candidat.