Michel Boivin

Directeur de recherche au CNRS, Co-directeur du Centre d'Études de l'Inde et de l'Asie du Sud - CEIAS

Michel Boivin a reçu une formation d’historien et d’islamologue aux universités de Lyon 2, Lyon 3 et Paris 3-Sorbonne Nouvelle. Après sa thèse qui portait sur le discours réformateur exprimé par Sultân Muhammad Aghâ Khân (1877-1957), il s’est orienté vers une approche axée sur l’anthropologie historique en obtenant une HDR en ethnologie à l’université de Paris X-Nanterre. Il a analysé les conséquences de l’adhésion d’un conglomérat de castes, connu sous le nom de Khojas, au chiisme ismaélien. Expulsé de Perse, l’imâm des chiites ismaéliens s’est établi dans le Sindh au milieu du XIXe siècle. Il a déployé différentes stratégies pour prendre le contrôle de la caste des Khojas. Cette confrontation était aussi celle de deux cultures religieuses : la culture chiite de la Perse et la culture hindoue de l’Inde. Le corps social que constituait la caste mit en œuvre des stratégies de résistance mais en définitive, et compte tenu des bouleversements que subit le sous-continent indien à cette époque, son identité en tant que caste se réfugia dans quelques rituels et pour le reste, les Khojah devinrent des chiites ismaéliens soumis à l’imâm qui sont progressivement en train de se départir de leur identité de Khojah.

Depuis, Michel Boivin a développé plusieurs axes de recherches qui se sont déployés pour la plupart autour de la notion de soufisme. Cette réflexion a été nourrie par un terrain de longue durée réalisé dans la ville sainte de Sehwan Sharif, où se trouve le sanctuaire de La`l Shahbâz Qalandar (m. 1274). De 2008 à 2011, il a coordonné un groupe de recherche interdisciplinaire et international qui étudiait  l’interaction entre le développement du pèlerinage (ziyarat) et l‘essor de l’urbanisation. Au sein de ce programme, sa recherche personnelle portait sur les processus de normalisation de la Qalandariyya dans un contexte régional, et le rôle de l’élite urbaine dans la gestion pluriconfessionnelle du sanctuaire. En 2011, ce programme l’a conduit à se déplacer vers l’Inde, le Maharashtra et le Gujarat, où nombre de hindous sehwanis sont allés s’établir après 1947. Ses entretiens avec les Thakurs, les prêtres d’Udero Lal, qui constituaient un groupe dominant de Sehwan, lui ont permis de restituer la place de cette caste sacerdotale dans la société locale.

Par ailleurs, Michel Boivin a observé la résilience des pratiques soufies chez les hindous sindhis de l’Inde. A travers la notion de soufisme hindou, cette résilience a été approchée en termes de compositions et de publications de poésie soufie en sindhi, mais également de flexibilité des rituels qui sont en permanence adaptés en fonction de l’environnement. Il a questionné la notion de soufisme à travers d’autres approches. Il a d’abord travaillé sur plusieurs traditions soufies en évaluant en particulier l’importance de la tradition du samâ` et le rôle de différentes catégories de musiciens dans le culte. Il a mené d’autres travaux sur des mausolées soufis, ou connectés au soufisme, dans lesquels les rapports de classes étaient négociés à travers la distribution des rôles rituels (Pir Pithoro, Jhok Sharif). La mise en œuvre d’une approche anthropologique l’a conduit à analyser le fait soufi en tant que rapport de classes et idiome culturel.

Actuellement, Michel Boivin travaille sur la construction du savoir dans le Sindh colonial en rapport avec l’émergence d’une intelligentsia. Ce processus s’est appuyé sur une objectivation du soufisme initiée par les Britanniques, qui s’est prolongée par une autre phase où la nouvelle élite sindhie, une intelligentsia, s’est approprié cet héritage. Cette appropriation a toutefois été marquée par la transformation de l’héritage du tasawuf en une sufiyani saqafat, c’est-à-dire le passage du soufisme à la culture soufie. Le soufisme a alors constitué la matrice d’un idiome qui était employé par les soufis, mais également par d’autres traditions dévotionnelles musulmanes comme hindoues. Michel Boivin a également travaillé sur l’interaction communautés-territoires dans la mégapole de Karachi et plus récemment sur l’émergence d’un culte autour de la figure de Benazir Bhutto.

Évenements

Mardi 3 janvier 2023
Conférence
Les Conférences publiques de l’Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISMM), en partenariat avec la Bibliothèque universitaire des langues et civilisations (Bulac), se poursuivent le 3 janvier 2023 de 18h30 à 20h, avec : Michel Boivin, directeur de recherche au CNRS,...
Lundi 27 mai 2019
Journée(s) d'étude
Programme (En anglais) 10:15 - Welcome Address by CEIAS Director 10:20 - Opening remarks by Michel Boivin, Annabelle Collinet, Sepideh Parsapajouh 10:30 - Karen Ruffle (University of Toronto), EHESS-IISMM Invited Professor Presence in Absence: The Formation of Reliquary Shiism in Qutub Shahi Hyderabad In this...
Mardi 31 mai 2016, Mercredi 1 juin 2016
Journée(s) d'étude
Workshop organized by CEIAS research groups "New Muslim Elite and the Vernacular" and "Gujarati and Sindhi Studies". Program 31st May 2016 17h - Welcoming by the CEIAS Director 17h05 - About Sindhology as a field , Michel Boivin (CNRS-CEIAS) 17h20 - Key Note Address: Looking...